Introduction
Certains nient la doctrine de la dépravation totale, et en particulier son corollaire de l'incapacité totale. Il est donc nécessaire que nous montrions à partir des Écritures où une incapacité intérieure pour croire librement en Jésus-Christ et en son Évangile est enseignée. En d'autres termes, nous devons établir pourquoi il doit y avoir une action intérieure de la part du Saint-Esprit en vue de la libération de l'emprise de notre nature pécheresse sur notre volonté.
Cette doctrine devient de plus en plus importante, car les croyants non seulement nient l'enseignement biblique, mais supposent également que la théologie arminienne nie cet axiome biblique et réformé. Les arminiens affirment à la fois la dépravation totale et l'incapacité totale1Comprenez deux vérités importantes concernant l'arminianisme et la doctrine de la dépravation totale : 1) nous évitons la terminologie de « corps sans vie » concernant ceux qui sont « morts par leurs offenses et par leurs péchés » (Éph. 2:1) puisque les auteurs de l'Écriture n'utilisent pas cette terminologie; et 2) nous évitons également toute notion selon laquelle la régénération doit précéder la foi. Premièrement, nous préférons le langage biblique de la « séparation » en ce qui concerne ceux qui sont morts par leurs péchés, parce que les auteurs de l'Écriture le font aussi, que ce soit explicitement (cf. Es 59:2 ; Eph. 2:12-13) ou implicitement (Luc 15:24, 27, 32). Deuxièmement, nous postulons que la grâce habilitante est la grâce suffisante qui permet de libérer une personne pour qu'elle puisse répondre librement. La réponse positive de la foi est la condition pour que Dieu régénère le croyant. Prenons, pour un bref exemple ce dont saint Paul informe les croyants de Colosse : « Vous qui étiez [lit. étant : participe présent ; cf. Éph. 2:1] morts par vos offenses [cf. Éph. 2:1] et par l’incirconcision de votre chair [ou nature pécheresse], il vous a rendus à la vie [c'est-à-dire vous a régénéré] avec lui, en nous faisant grâce pour toutes nos offenses » (Col. 2:13). Ici, être pardonné de ses péchés précède l'action d'être régénéré par Dieu. Si nous sommes pardonnés de nos péchés par grâce et par la foi en Jésus-Christ, alors la foi précède la régénération. Il faut noter que lorsque les arminiens font appel au libre arbitre, la référence concerne généralement des questions sans rapport avec le domaine spirituel. Par exemple, lorsqu'une personne pèche, cette personne pèche librement, elle pèche de son plein gré. Dieu n'a pas décrété ou rendu certain qu'une personne pèche. Par contre, pour ce qui concerne la grâce, la miséricorde, le pardon des péchés, la réconciliation avec Dieu, la paix avec Dieu, le salut, la sanctification, la justification, la glorification, de telles choses surviennent dans la vie d'une personne uniquement par la grâce proactive et suffisante de Dieu agissant dans le pécheur déchu et impuissant.. Dans le cadre de la conversion, nous n'affirmons pas le libre arbitre, mais plutôt le libre arbitre libéré. C'est-à-dire que l’arbitre est libéré par l'Esprit Saint pour répondre librement à l’Évangile2ABASCIANO, Brian. Exposé de la théologie arminienne (avec appui scripturaire). In : Arminianisme Évangélique [en ligne]. 2020-06-29. Disponible à l’adresse : https://arminianisme-evangelique.fr/le-salut-la-doctrine-biblique-de-la-grace/..
Que les êtres humains naissent avec une nature pécheresse n'est nié que par les pélagiens et certains semi-pélagiens. Cette déclaration est énoncée non pas en vue d'être utilisé en tant que sophisme par association, mais comme un simple fait3FLOWERS, Leighton. Pelagianism the boogie man. In : Soterilogy 101 [en ligne]. 2018-02-11. Disponible à l’adresse : https://soteriology101.com/2018/02/11/pelagianism-the-boogie-man/.. D'autre part, la question de savoir si des hommes mortels sont nés coupables du péché d'Adam n'est pas examinée ici.
Les effets de la dépravation totale humaine
Qu'est-ce qu'implique la possession d'une nature pécheresse ? Ou, plutôt, quels effets découlent de la possession d'une nature pécheresse ? Une personne pécheresse peut-elle accomplir une bonne action ? Oui. Jésus confesse que nous sommes mauvais, dans notre être même ou dans notre nature, pourtant nous savons donner de bonnes choses à nos proches. (Mat. 7:11) Les pécheurs peuvent aimer, raisonner, accomplir de bonnes œuvres pour les autres, prendre soin des pauvres et une foule d'autres activités positives liées au domaine de l'humanité et de la nature humaine. Mais qu'en est-il du domaine spirituel ? Que peut accomplir spirituellement un homme mortel et pécheur ? La réponse est simple : rien. Concernant l'acte de croire en Christ, la condition requise par Dieu pour le salut de son âme, Jésus lui-même confesse :
« Nul ne peut venir à moi, si le Père qui m'a envoyé ne l'attire » (Jean 6:44, italiques ajoutés).
Ceci peut également être exprimé de la manière suivante : « personne ne peut [c'est-à-dire n'a la capacité de] venir à Jésus à moins que cela ne lui ait été accordé [donné, offert] de la part du Père ». Notez que les expressions « venir à » et « croire en » Jésus sont utilisées de manière synonymique (cf. Jean 6:29, 35, 37, 40). Pourquoi, cependant, l'Esprit de Dieu doit-il « attirer » et « habiliter » (cf. Phil. 1:29) une personne pour que celle-ci puisse croire en Jésus-Christ ? Jésus relie ce problème à l'incapacité. Dieu doit d'abord adopter une position proactive à notre égard si nous voulons croire. Par conséquent, nous sommes incapables de croire en Jésus et de venir à Lui sans une œuvre prévenante (préalable) de la grâce habilitante. Cette vérité dénote la condition spirituelle de notre nature déchue qui est une réalité dès la naissance.
Les arguments contre la dépravation totale
Une personne niant cette compréhension de la grâce prévenante peut argumenter, comme le fait Leighton Flowers,
« Nous ne devons pas présumer, juste du fait que l'homme soit né déchu que l'Évangile n'est pas à la hauteur de la tâche de permettre à l'homme déchu de répondre à son appel et à la réconciliation de cette chute4FLOWERS, Leighton. Disabled from birth by God's design. In : Soterilogy 101 [en ligne]. 2015-08-15. Disponible à l’adresse : https://soteriology101.com/2015/08/16/disabled-from-birth-by-gods-design/.. » (Italiques ajoutés)
Toutefois, le message ou les paroles de la Bonne Nouvelle ne sont pas des paroles magiques : les paroles ne permettent pas à une personne de croire en Jésus. Les mots peuvent informer un individu d'une information, mais ils ne peuvent pas spirituellement permettre une personne d'assumer une action. Or, l'habilitation spirituelle est au centre ici, puisqu'une personne charnelle ou physique « n'accepte pas les choses de l'Esprit de Dieu, car elles sont une folie » pour cette personne. En effet, cette personne ne peut pas les comprendre, car ces choses doivent être évaluées, examinées ou discernées spirituellement. (1 Cor. 2:14). À moins que le Saint-Esprit ne permette et n'accorde à une personne de croire librement, cette personne ne croira pas, parce que cette personne ne peut pas croire. Leighton n'est pas d'accord et argumente davantage :
« Pensez-y objectivement pendant une minute. Enseigner ce concept de régénération pré-foi [du point de vue et de la théologie calviniste] ou même la nécessité de la « grâce prévenante » [qui est la perspective et la théologie arminienne que Leighton rejette] signifie que vous devez affirmer que Dieu a décidé ( pour une raison inconnue) de nous punir tous pour le péché d'Adam en nous rendant tous naturellement incapables de répondre volontairement à sa propre parole à moins qu'il ne fasse activement quelque chose pour nous rendre capables à nouveau. Cela a-t-il un sens rationnel s'il est considéré objectivement5Ibid.? »
Premièrement, l'objectivité pure n'appartient qu'à Dieu seul, donc faire appel à une perspective objective est futile. Ni les calvinistes, ni les arminiens, ni ceux qui suivent Leighton ne sont objectifs. Cette question relève de l'exégèse biblique guidée par son herméneutique particulière. La perspective de Leighton, citée ci-dessus, n'est pas objective : elle est basée sur sa méthode exégétique qui est informée par son herméneutique particulière.
Deuxièmement, ni les calvinistes ni les arminiens ne suggèrent que Dieu, pour une raison inconnue, a décidé de nous punir tous pour le péché d'Adam en nous rendant tous naturellement incapables de répondre volontairement à sa propre parole. Dieu ne nous a pas « rendus naturellement incapables de répondre volontairement » à l'Évangile : Nous sommes simplement nés incapables de manière innée de répondre volontairement à l'Évangile en dehors de l'œuvre intérieure du Saint-Esprit. Cela fait partie de ce que signifie être « mort par les péchés ». (Eph. 2:1) Nous sommes morts aux réalités spirituelles impliquant Dieu, Son Fils, Son Esprit et Sa parole. Nous sommes incapables par nature. Dieu ne nous punit pas tous pour le péché d'Adam en faisant de nous tous des pécheurs. Nous sommes naturellement nés pécheurs. (Rom. 3:23) Dieu ne nous punit pas tous pour le péché d'Adam en faisant de nous tous des incroyants. Nous sommes incroyants par nature (Jean 3:18).
Même si la question était telle que Leighton l'a présentée ci-dessus, Dieu serait-il injuste en nous punissant de cette manière, étant donné qu'Il a Lui-même soumis la nature à la vanité à cause du péché d'un seul homme (cf. Rom. 8:20) ? Pourtant, à la lumière de tels arguments présentés par les arminiens et les calvinistes, certains refusent d'accepter la dépravation totale et l'incapacité totale comme étant bibliques. Souvent, ces mêmes personnes insisteront sur le fait qu'une habilitation, de quelque manière que ce soit, est une doctrine gratuite. Les gens seraient capables, par eux-mêmes, de répondre librement à la Bonne Nouvelle du salut par la grâce et par la foi au Christ. Tout ce qui est requis, serait qu'une personne entende l'Évangile. Si cela est vrai, alors il n'est pas nécessaire que de telles personnes insistent sur le fait que l'Évangile habilite ou rend capable l'homme à croire en Christ. Pourtant, certaines le font bien que cela soit incohérent.
Les arguments en faveur de la dépravation totale
Saint Paul enseigne au sujet des juifs, « qu'ils sont devenus durs d'entendement. Car jusqu’à ce jour, le même voile demeure » sur leur esprit (2 Cor. 3:14). Il s'agit d'un voile qui les rend incapables de croire librement au Christ. Il continue d'enseigner que l’Évangile « est voilé pour ceux qui périssent » (2 Cor. 4:3) ceux dont le diable « a aveuglé l’intelligence » (2 Cor. 4:4), de sorte qu'une incapacité inhérente est rendue réelle par cet aveuglement. Par conséquent, une habilitation de Dieu doit être réalisée si quelqu'un veut librement faire confiance à Christ. Comment le Saint-Esprit accomplit-il cette tâche ? En surmontant notre aveuglement (2 Cor. 4:6), en nous sollicitant, nous attirant et en nous dirigeant vers Christ (Jean 6:44 ; 6:65 ; Phil. 1:29). Il accomplit cette tache en nous amenant à la repentance (Rom. 2:5), par la prédication de la Parole, ou la puissance de l’Évangile de Jésus-Christ (Rom. 1:16, 17), l'écoute spirituelle de cet Évangile (Gal. 3:2, 5), et par Sa conviction de notre péché, notre manque de justice et le jugement à venir (Jean 16:8-11). Le Saint-Esprit est celui qui accomplit cette œuvre. Ce n'est pas seulement les paroles de l’Évangile, ou simplement la prédication d'un sermon. La véritable Personne du Saint-Esprit est l'agent de notre salut à travers Son activité gracieuse et habilitante.
Considérez aussi la notion d'incapacité de l'état de péché dans lequel toute personne se trouve :
« Vous étiez morts [lit. étant morts : participe présent] par vos offenses et par vos péchés, dans lesquels vous marchiez autrefois, selon le train de ce monde, selon le prince de la puissance de l’air, de l’esprit qui agit maintenant dans les fils de la rébellion. » (Éph. 2:1-2, italique ajouté)
Remarquez que les incroyants vivent leur vie selon les normes de leur culture (c'est-à-dire, « selon le train de ce monde ») et aussi selon l'esprit mauvais qui « agit dans » ces incroyants. Si l'on veut librement faire confiance au Christ et ainsi être sauvé, notre désobéissance inhérente nécessite une action intérieure du Saint-Esprit. Ceci se produit alors qu'une opposition existe non seulement de la part de notre nature corrompue, mais aussi de la part des esprits mauvais qui travaillent dans le cœur. Devons-nous croire la théorie de ceux qui rejettent la doctrine de l'incapacité totale, selon laquelle une personne est intrinsèquement capable de faire confiance au Christ par la simple audition de l'Évangile, bien que le malin travaille dans son cœur qui est lui-même volontairement désobéissant envers l’Évangile ?
De plus, la nature des hommes mortels déchus est celle dans laquelle « toutes les pensées de leur cœur se [portent] chaque jour uniquement vers le mal. » (Gen. 6:5). Jésus affirme que «
Quelqu'un peut argumenter : « Mais, cela semble calviniste! » Quand bien même, nous pensons que cela semble biblique, réformé, orthodoxe. Arminius ajoute que :
« Notre volonté n'est pas exempte des conséquences de la chute originelle ; c'est-à-dire qu'elle n'est pas libre de faire le bien [spirituel, comme la foi en Jésus-Christ], à moins qu'elle ne soit rendue libre par le Fils par le moyen de son Esprit7Ibid., p. 194.. »
Saint Paul, dans l'épître aux Ephesiens, mentionnée précédemment, informe les croyants que la grâce de Dieu lui est « accordée par l’efficacité de sa puissance » (Éph. 3:7 ; Éph. 1:19). Il déclare également : « Or, à celui qui peut faire, par la puissance qui agit en nous, infiniment au-delà de tout ce que nous demandons ou pensons » (Eph. 3:20, italiques ajoutés). Nous devons avoir la puissance personnelle de Dieu, par son Saint-Esprit, travaillant en nous pour pouvoir accomplir quelque bien spirituel que ce soit. La foi en Christ est le bien spirituel ultime. Même après avoir été régénérés par la foi en Christ par le moyen de la grâce, nous ne pouvons pas comprendre les choses spirituelles sans l'Esprit de Dieu (1 Cor. 2:14). Nous ne pouvons accomplir des œuvres spirituelles authentiques en Christ, ni nous engager dans des disciplines spirituelles sans la puissance agissante de l'Esprit de Dieu qui habite en nous (Eph. 2:10 ; Phil. 2:12-13). Ainsi, comment pourrions-nous supposer que les hommes peuvent croire librement en Jésus-Christ, dans le contexte de leur être dépravé et impuissant, par la simple écoute de l’Évangile? Une telle conception semble être dénuée du sens spirituel de l’Évangile et du Salut.
Ainsi, considérer la nature déchue des personnes pécheresses comme une opposition la rendant impuissante face à Dieu, ainsi que considérer la vérité de l'incapacité spirituelle deviennent un principe théologique et biblique nécessaire à défendre. Alors que l'humanité existe dans un état d'impuissance et de péché (Rom. 5:6-8), alors que l'humanité est considérée comme ennemie et hostile à Dieu (Rom. 5:10), Christ meurt pour ces pécheurs déchus. Si nous sommes ennemis de Dieu et que nos cœurs sont opposés aux réalités spirituelles de Dieu, alors nous avons besoin d'aide, dénotant ainsi notre incapacité. Si l'esprit est « fixé sur la chair », c'est-à-dire une disposition intérieure qui est égocentrique et qui porte volontairement des œillères pécheresses, alors cette nature est : « est inimitié contre Dieu, parce qu’elle ne se soumet pas à la loi de Dieu, et qu’elle ne le peut même pas » (Rom. 8:7, italiques ajoutés). Ici encore, nous dénotons l'incapacité : les non-régénérés ne sont pas capables de recevoir les réalités spirituelles de Dieu, telles que l'obéissance aux lois de Dieu (et « les œuvres que Dieu exige » est la croyance en Jésus-Christ, cf. Jean 6:29), indépendamment de la puissance intérieure du Saint-Esprit lui-même.
De simples paroles de l’Évangile peuvent-elles amener une personne à ne plus être hostile envers Dieu en dehors de l'action intérieure du Saint-Esprit ? Cela semble être une conception impossible à accepter. Saint Luc rapporte : « A Icone, Paul et Barnabas entrèrent ensemble dans la synagogue des Juifs, et ils parlèrent de telle manière qu’une grande multitude de Juifs et de Grecs crurent » (Actes 14:1, italiques ajoutés). Devons-nous imaginer que Paul et Barnabas ont gagné des convertis au Seigneur en dehors de l'action intérieure et puissante du Saint-Esprit au travers d'un simple discours persuasif ? Non. Paul écrit aux Corinthiens :
« J’étais auprès de vous dans un état de faiblesse, de crainte, et de grand tremblement; et ma parole et ma prédication ne reposaient pas sur les discours persuasifs de la sagesse, mais sur une démonstration d’Esprit et de puissance, afin que votre foi soit fondée, non sur la sagesse des hommes, mais sur la puissance de Dieu » (1 Cor. 2:3-5, italiques ajoutés).
La nature spirituelle des cieux interdit que nous percevions la grâce de Dieu pour le salut en dehors d'une œuvre intérieure habilitante du Saint-Esprit. Rejeter la doctrine de la dépravation totale, c'est dire au Saint-Esprit : « Nous n'avons pas besoin de ton aide, car nous pouvons avoir la foi en Jésus-Christ par nous-mêmes et de nous-mêmes. » [...]
Jésus confessa que, lorsqu'Il remonterait vers le Père, Lui et le Père enverraient le Saint-Esprit : « Et quand il sera venu, il convaincra le monde en ce qui concerne le péché, la justice, et le jugement » (Jean 16:8). La [Bible du Semeur] traduit ce verset comme suit : « il produira la preuve que le monde s’égare au sujet du péché, de ce qui est juste et du jugement ». Le mot grec ἐλέγχω fait référence à réprimander, discipliner, exposer, montrer qu'il est coupable81651. elegchó. In : Bible Hub [en ligne] 2021. Disponible à l'adresse : https://biblehub.com/greek/1651.htm.. Pourquoi le Saint-Esprit doit-il accomplir ce travail intérieur si tout ce qui est nécessaire pour qu'une personne croie en Christ est d'entendre l’Évangile pour savoir que le salut se trouve en Christ ? La réponse ne pourrait-elle pas se trouver dans la vérité du fait que notre condition spirituelle déchue nécessite que le Saint-Esprit doit accomplir une œuvre intérieure et puissante si une personne veut avoir confiance en Christ ? Toutes les références dans les Écritures qui relatent une incapacité innée à croire en Christ et à venir à Christ pour le salut ne pourraient-elles pas collectivement nous informer qu'en raison de notre condition déchue, nous sommes des ennemis impuissants incapables de croire en Christ ? Y-a-t-il donc pas nécessité d'un puissant travail intérieur du Saint-Esprit si personne ne veut avoir foi en Christ ?
Nous insistons autant car c'est ce que nous pensons. Nous voyons cet enseignement comme étant si manifestement biblique que le nier revient à nier la nature de la grâce elle-même. Pourquoi avons-nous besoin de cette grâce intérieure ? Parce que notre nature, depuis la naissance, est séparée des vérités ultimes de Dieu et notamment de la Vérité incarnée elle-même, Jésus-Christ. L'intention même de notre cœur est mauvaise dès la naissance (Genèse 8:21 ; Ps. 51:5, 58:3). Le cœur des hommes mortels déchus est plus trompeur que tout le reste et est désespérément malade (Jér. 17:9). Même ceux qui connaissent Dieu d'une manière générale, suppriment la vérité par leur méchanceté et refusent de l'honorer comme Dieu (Rom. 1:18-21). Une nature telle que celle-ci requiert plus que de simples mots pour obtenir une réponse efficace. Une nature telle que celle-ci requiert un puissant travail intérieur du Saint-Esprit qui libère cette nature des griffes de la dépravation afin de susciter une réponse libérée, dans la confiance en Christ, pour une expérience de salut.
Arminius est d'accord avec le portrait de la nature méchante telle qu'enseignée dans l'Écriture :
« A cette obscurité de l'esprit succède la perversité des affections et du cœur, qui hait et qui a en aversion ce qui est vraiment bon et agréable à Dieu ;mais qui aime et poursuit ce qui est mal9Ibid., p. 193.. »
Devons-nous croire que la simple audition de l'annonce du salut par la foi en Jésus est tout ce qui est nécessaire pour amender ou surmonter notre nature perverse ayant une aversion pour ce qui est vraiment bon et agréable à Dieu ? Les arminiens répondent non. Arminius poursuit : « Correspondant exactement à ces ténèbres de l'esprit et à cette perversité du cœur, se trouve [...] la faiblesse totale de tous les pouvoirs pour accomplir ce qui est vraiment bon10Ibid., p. 193-194.. » Il cite ensuite Matthieu 7:18, Matthieu 12:34, Jean 6:44 et Romains 8:7. Il conclut : « Tous ces passages ont le même but qui est de montrer que l'homme dans cet état est dit être sous le pouvoir du péché et de Satan, réduit à la condition d'esclave, et "fait captif par le diable". (Rom. 6:20 ; 2 Tim. 2:26)11Ibid., p. 194.. »
Conclusion
Devons-nous imaginer que la simple audition du salut par la foi en Jésus est tout ce qui est nécessaire pour être libéré de l'esclavage spirituel et de la captivité du diable ? Non. Nous sommes d'accord avec ce que nous croyons être l'enseignement pur des Écritures, tel qu'il est promu par Arminius et ceux de la tradition réformée, selon lequel « notre volonté n'est pas exempte de la chute originelle ; c'est-à-dire qu'elle n'est pas libre de faire le bien, à moins qu'elle ne soit rendue libre par le Fils par son Esprit12Ibid.. » Cet enseignement arminien inspire l'érudit calviniste R. C. Sproul à confesser :
« Arminius [et, par conséquent, les arminiens] non seulement affirme l'esclavage de la volonté, mais insiste sur le fait que l'homme naturel, étant mort dans le péché, existe dans un état d'incapacité morale ou d'impuissance13SPROUL, R. C.. Willing to Believe: The Controversy over Free Will. Grand Rapids : Baker, 1997, p. 128.. »
Que pourrait espérer de plus un augustinien ou un calviniste d'un théologien ? Arminius déclare alors que le seul remède à la condition déchue de l'homme est l'opération gracieuse de l'Esprit de Dieu. Sproul conclut :
« Le langage d'Augustin, de Martin Luther ou de Jean Calvin n'est guère plus fort que celui d'Arminius14Ibid., 126.. »
La doctrine de la dépravation totale, et son corollaire de l'incapacité totale, n'est pas simplement un enseignement calviniste ; mais c'est, pensons-nous, un précepte biblique et réformé qui appartient à la théologie de Jacob Arminius, ses successeurs les remontrants, ainsi qu'à l'arminianisme moderne.
[N.D.L.R.: Voir en complément l'article suivant : Le processus du salut par grâce]
Article original : SOLUS, Arminius. Once More Unto the Breach: Total Depravity and Total Inability. In : Society of Evangelical Arminians [en ligne]. 2016-06-06 [consulté le 2021-12-14]. Disponible à l’adresse : https://evangelicalarminians.org/once-more-unto-the-breach-total-depravity-and-total-inability/
Source des citations bibliques : La Sainte Bible : nouvelle édition de Genève 1979. Genève : Société Biblique de Genève, 1979.