Dieu donne-t-il la victoire sur la tentation ou le pouvoir de vaincre la tentation ? (1 Corinthiens 10:13)

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Photo : Bas relief (ref. 3476) du musée national archéologique d'Athènes représentant un combat de lutte du pentathlon [détail].

Aucune tentation ne vous est survenue qui n’ait été humaine, et Dieu, qui est fidèle, ne permettra pas que vous soyez tentés au-delà de vos forces; mais avec la tentation il préparera aussi le moyen d’en sortir, afin que vous puissiez la supporter. (1 Corinthiens 10:13)

Si en effet la chair convoite contre l’esprit et l’esprit contre la chair, il y a pour nous parfois une lutte contre la chair et le sang, c’est-à-dire tant que nous sommes hommes et marchons selon la chair et tant que nous ne pouvons éprouver des tentations plus fortes que les tentations humaines, puisqu’il est dit de nous : que la tentation ne vous atteigne pas, si ce n’est une tentation humaine ! Car Dieu est fidèle, lui qui ne permettra pas que vous soyez tentés plus que vous ne pouvez le supporter.

Ceux qui président aux luttes ne laissent pas ceux qui viennent au combat se mettre à lutter les uns contre les autres de n’importe quelle manière, ou par suite du hasard, mais après un examen attentif des corps et des âges, les ayant comparés de la façon la plus équitable, ils associent celui-ci avec celui-là, cet homme avec cet autre, mettant par exemple des enfants avec des enfants, des hommes avec des hommes, de manière qu’ils se correspondent par la similitude de leur âge et de leur force.

Il faut penser de même de la providence divine : tous ceux qui descendent dans les luttes de la vie humaine, elle les gouverne dans sa très juste administration selon la mesure de la vertu de chacun, que connaît seul celui qui voit seul les cœurs des hommes.

Ainsi l’un combat contre telle chair, l’autre contre telle autre, celui-ci pendant un tel espace de temps, celui-là pendant tel autre, cet homme sera soumis à telle excitation charnelle qui le pousse dans tel ou tel sens, celui-là à telle autre ; parmi les puissances ennemies l’un aura à résister à celle-ci ou à celle-là, l’autre à deux ou trois à la fois et tantôt contre l’une, tantôt de nouveau contre l’autre, à un certain temps contre celle-ci et à un certain temps contre celle-là, après tels actes il luttera contre les unes, après tels autres contre les autres. Vois si l’Apôtre n’indique pas quelque chose de semblable lorsqu’il dit : Dieu est fidèle, au point de ne pas permettre que vous soyez tentés plus que vous ne pouvez le supporter, c’est-à-dire que chacun est tenté selon son degré ou ses possibilités de vertu.

Nous avons donc dit que, par un juste jugement de Dieu, chacun est tenté selon son degré de vertu, mais il ne faut pas croire pour cela que de toute façon celui qui est tenté doit vaincre. Il en est de même du lutteur qui, malgré le soin qu’on a mis à lui donner un adversaire d’égale force, ne pourra vaincre de toute façon. En effet si la force des lutteurs n’était pas égale, la palme du vainqueur ne serait pas juste, ni la faute du vaincu : c’est pourquoi Dieu permet que nous soyons tentés, mais pas plus que nous ne pouvons le supporter ; nous sommes tentés selon nos forces.

Cependant il n’est pas écrit que Dieu fera en sorte que nous réussissions à supporter la tentation, mais que nous puissions la supporter, autrement dit : il nous donne de pouvoir la supporter. Il nous appartient d’employer avec diligence ou avec négligence ce pouvoir qu’il nous a donné lui-même.

Conclusion

Il n’est pas douteux que, dans toute tentation, nous avons la force de la supporter, si cependant nous usons convenablement du pouvoir donné. Ce n’est pas pareil d’avoir la possibilité de vaincre et de vaincre, comme l’Apôtre lui-même avec beaucoup de précautions l’indique en ces termes : Dieu vous donnera les moyens pour pouvoir supporter, et non : pour supporter. Car beaucoup ne supportent pas, mais sont vaincus dans la tentation. Dieu donne, non de supporter - autrement, semble-t-il, il n’y aurait aucun combat -, mais de pouvoir supporter.

[N.D.L.R. : Sur la question de la nature du libre arbitre, William Lane Craig, montre que ce verset est une bonne illustration de la possibilité de choix contraire, qui soutient le principe de libre arbitre libertarien autorisant la responsabilité morale. Cette conception du libre arbitre s'oppose au libre arbitre compatibiliste du calvinisme par exemple (déterministe théologique) ou la possibilité de choix contraire n'existe pas :

« Imaginez une situation dans laquelle une personne succombe à la tentation. La déclaration de Paul en 1 Corinthiens 10:13 implique que dans une telle situation, Dieu a fourni une voie d'évasion que la personne aurait pu emprunter, mais qu'elle a choisi de ne pas prendre. En d'autres termes, dans cette situation précise, la personne avait le pouvoir soit de succomber, soit de prendre la sortie, c'est-à-dire qu'elle avait une liberté libertarienne. C'est précisément parce que la personne n'a pas emprunté la voie de sortie divinement prévue qu'elle est tenue responsable1CRAIG, William L.. A Middle-Knowledge Response to Augustinian-Calvinist View. In : Divine Foreknowledge : Four Views. Westmont : InterVarsity Press, 2001, p. 202.. »]


Source : CROUZEL, Henri, SIMONETTI, Manlio. Origène : Traité des principes. Paris : Cerf, 1980, vol. 3, p. 164-166.

Références

  • 1
    CRAIG, William L.. A Middle-Knowledge Response to Augustinian-Calvinist View. In : Divine Foreknowledge : Four Views. Westmont : InterVarsity Press, 2001, p. 202.